vendredi 13 novembre 2020
A l’issue d’une réunion extraordinaire, les ministres des Finances du G20 ont annoncé l’adoption d’un « cadre commun de traitement de la dette » des pays pauvres, allant au-delà du moratoire sur le paiement des dettes qu’ils avaient lancé en avril dernier. Des discussions auxquelles la France a activement participé. Mais alors qu’une vague de crises de la dette menace de déferler sur les pays en développement, le cadre annoncé prévoit des restructurations au cas par cas, uniquement pour les pays les plus pauvres, évite le recours aux annulations de dette et n’assure pas la participation de l’ensemble des créanciers. Des annoncent qui déçoivent la société civile qui appelait à l’annulation rapide des dettes et à la mise en place d’un mécanisme multilatéral permanent de restructuration des dettes.
Alors qu’il reconnait la nécessité urgente de restructurer les dettes des pays pauvres, le cadre de restructuration présenté par le G20 ne prévoit d’annulations de dettes que de manière exceptionnelle, leur préférant les rééchelonnements et réductions de dettes. Pour Lison Rehbinder du CCFD-Terre Solidaire, « les crises inédites auxquelles font face les pays en développement depuis le début de la pandémie, et qui menacent des centaines de millions de personnes, nécessitent que les ressources de ces pays soient affectées au financement des besoins de base des populations, et non au remboursement de la dette. De simples rééchelonnements ou réductions à la marge ne suffiront pas à rendre la dette de ces pays soutenable. Des annulations rapides et conséquentes sont nécessaires ».
Ce cadre de traitement de la dette est en outre présenté comme permettant la participation de l’ensemble des créanciers, un élément crucial pour en assurer la réussite. Mais les créanciers multilatéraux, comme la Banque mondiale, qui avaient déjà refusé de participer au moratoire lancé par le G20, ne sont pas contraints par le cadre de prendre part à ces restructurations. Les créanciers privés, comme les banques et fonds d’investissement, de leur côté, doivent être impliqués via les pays débiteurs à qui il appartiendra de demander des termes de restructuration similaires à ceux accordés par les États. Le cadre ne précise toutefois pas comment ces derniers pourraient être contraints d’accepter ces termes, ni ce qu’il se passerait s’ils venaient à refuser. Or, comme l’explique Louis-Nicolas Jandeaux d’Oxfam France, « les créanciers privés ont déjà refusé de participer au moratoire sur la dette, et rien ne garantit qu’ils se montreront plus coopératifs cette fois-ci. Ces créanciers détiennent des parts substantielles de la dette des pays en développement. S’ils ne participent pas aux allègements de dettes, non seulement les allègements concédés par les États seront insuffisants mais ils risquent de servir à rembourser les dettes privées plutôt qu’à financer les services publics dont les pays ont besoin ».
Si, comme elle l’a annoncé à la presse hier, la France souhaite un accord réellement « historique », elle, ainsi que les autres pays du G20, doivent aller au-delà de cette approche au coup par coup, et prendre rapidement position pour une solution juste et durable au problème de la dette des États du Sud, par des annulations de dette immédiates pour les pays en difficulté et la mise en place d’un cadre permanent de restructurations à l’ONU, où les voix des États débiteurs pourront également être entendues.
Contact presse :
Fanny Gallois
Plateforme Française Dette & Développement (PFDD)
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