mercredi 15 avril 2020
La France, par la voix du ministre de l’Economie et des Finances, Bruno Le Maire puis du président Emmanuel Macron, a annoncé mardi 14 avril un accord pour suspendre une partie des paiements de la dette pour l’année 2020 de 77 des pays les plus pauvres du monde, obtenu dans le cadre du Club de Paris et du G20. Cette annonce doit être confirmée lors de la réunion des ministres des Finances du G20 prévue aujourd’hui. Pour les organisations de la Plateforme Dette et Développement, un tel accord peut donner une bouffée d’air aux pays concernés mais reste bien insuffisant. De véritables annulations des dettes sont nécessaires pour permettre aux pays du Sud de faire face à la crise.
Cet accord permettra de libérer 12 milliards de dollars dans les pays pauvres cette année, bien nécessaires pour leur permettre de faire face à la crise de Covid-19. Toutefois, un simple moratoire ne fait que reporter le problème et l’aggraver. “Les dettes n’étant pas annulées, les remboursements attendus en 2020 seront toujours dus en 2021 et majorés des intérêts accumulés sur la période : la dette sera d’autant plus insoutenable en 2021.” explique Fanny Gallois, coordinatrice de la Plateforme Dette et Développement. Les paiements de dettes ainsi reportés seront majorés de 12,3 milliards de dollars, passant de 23 milliards à 35,3 milliards, alors que la crise économique qui débute risque de fragiliser les économies des pays les plus pauvres bien au-delà de 2020.
La France a également annoncé un accord sur un moratoire de la part des créanciers privés, équivalent à 8 milliards de dollars. Cependant, une simple suspension de ces dettes est également insuffisante : il est indispensable de s’assurer que les ressources libérées par le moratoire accordé par les créanciers publics ne soient pas détournées pour rembourser les créanciers privés. En particulier, le Royaume Uni et New York doivent légiférer pour prévenir toute poursuite contre un pays qui serait menacé pour avoir suspendu ses remboursements pendant la crise.
La France a enfin annoncé que pour des cas d’insoutenabilité de la dette, des annulations pourrait être accordées, au cas par cas et dans un cadre multilatéral. Pour ces cas d’insoutenabilité qui ne manqueront malheureusement pas de se présenter, le seul cadre multilatéral qui existe à ce jour pour procéder à ce type d’annulations, est celui du Club de Paris, un club de créanciers dont ni la Chine, ni les créanciers privés ne sont membres, et où les restructurations passées n’ont pour l’heure pas permis de prévenir un ré endettement insoutenable des pays.“Alors que les crises de la dette risquent de menacer durablement les Etats du Sud, la création d’un mécanisme onusien international de restructuration des dettes, rassemblant l’ensemble des prêteurs, publics et privés, transparent et équitable est plus que jamais nécessaire pour décider des annulations de dettes lorsque celles-ci s’imposent, comme c’est ici le cas.” explique Lison Rehbinder, chargée de plaidoyer au CCFD-Terre Solidaire.
Contacts presse :
Sophie Rebours - s.rebours@ccfd-terresolidaire.org - 07 61 37 38 65
Robin Guittard - rguittard@oxfamfrance.org, 07 72 09 79 36
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